Inspirs...expirs

Clins d’œil de la Vie

Carolle Bertrand

Chronique publiée par le Bulletin d'Aylmer le 1 septembre 2010   

« Minuit trente au pays des baleines… »

    WOW… ici, il fait noir. Ici on voit les étoiles, les millions d’étoiles. Ici, la voie lactée est vraiment lactée. Ici, c’est sur la Côte Nord, au camping le Paradis Marin des Bergeronnes, situé tout près du village les Escoumins, à 20 minutes de Tadoussac. Silence humain complet à minuit trente; au fait, ça fait déjà un bon deux heures que tout le monde semble dormir. On est le 16 août 2010.

J’y suis depuis une douzaine de jours. Soleil, soleil, fleuve calme et encore plus calme, c’est exceptionnel. Les baleines sont au rendez-vous : petits rorquals (8 à 10 mètres!) en masse, qui nous ont fait des spectacles de toutes sortes; rorquals à bosse (la fameuse baleine qui fait la joie de tous quand elle se projette hors de l’eau, fait des ‘flippes’ et plus encore); des troupeaux de bélugas qui s’étalent sur ce fleuve calme ajoutent à sa splendeur – je les appelle les anges du fleuve; un rorqual commun (20 mètres!!!), le plus bruyant des mammifères marins,  a fait quelques apparitions mais la baleine bleue ne s’est pas montrée.

Comme la météo nous promet des orages pour demain et que je comptais justement décamper en matinée, j’ai décidé, une fois la soirée en compagnie de mes voisins Chantale et Gino terminée, de commencer à ranger tout ce que je pouvais dans ma voiture avant d’aller dormir. L’effet magique de l’endroit est différent à cette heure-ci. Rien à voir mais on reste à l’écoute. Voilà! Un souffle! D’après la force de cette ‘explosion’ d’air, c’est un rorqual commun, c’est certain. Il n’est pas seul, j’en entends d’autres et ils sont proches. Eh bien, s’ajoute à ces gros souffles plein de petits poufs, ça me fait sourire, c’est un groupe de joyeux marsouins (des mini baleines qui ont une petite allure de dauphins). Les baleines ne dorment jamais profondément, un seul des deux hémisphères cérébraux est au repos pendant les phases de sommeil. Pendant que l’un dort, l’autre fait la garde et, s’occupe de la respiration. Difficile à imaginer, mais, pour les cétacés, la respiration n’est pas un réflexe, c’est un geste volontaire (comme se nourrir); ils doivent donc penser à respirer et ne peuvent donc jamais s’endormir complètement.

Ah! Qu’est-ce que j’entends maintenant? Là ça respire fort et encore plus près de moi; on dirait même quelqu’un qui se mouche… ce sont des phoques, des inspirations et des expirations plutôt rapides, j’ai l’impression qu’ils sont sur les rochers. Ah les p’tits mosusses, on ne les voit jamais sur les rochers pendant la journée. Et ça continue… une musique de souffles à la fois percutants et doux. Finalement, je n’ai rien rangé, je suis restée là pendant un bon bout, captivée par cette écoute et plongée dans le mystère, incapable de mettre des mots sur les secrets que les baleines me filent.

Une heure trente au pays des baleines; je suis dans la tente avec mon portable et je commence à écrire … des choses ordinaires; je n’ai pas de mots pour transmettre ce que l’Extraordinaire, l’Infini et l’Immensité me racontent ici. Heureusement, j’ai pu capter leurs chants, leurs messages avec mes craies et mon papier et je repartirai demain vers l’Outaouais avec une belle collection de dessins, Édition Paradis Marin 2010.

          

Photos: Au camping le Paradis Marin des Bergeronnes, le pays des baleines, tout près du village les Escoumins, à 20 minutes de Tadoussac. C'est ici que la Collection Spirit Drawings, Édition Paradis Marin 2010, a été canalisée.