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Et si demain...       Carolle Bertrand
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29 juin 2013

Ma chanson à moi, ta chanson à toi

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Chronique publiée par le Bulletin d'Aylmer le 26 juin 2013

« Y a très longtemps j’me suis prom’née, me suis d’mandée,  pourquoi les gens n’chantaient plus, sur ma rue à moi. »

Ouen, comme on dit, la vie fait de drôles de choses. Pas si drôle au fond, des fois. On se demande bien pourquoi – les réponses, selon moi, on se les invente par la force des choses et selon nos moyens de survie de l’heure. Y a des vies qui chavirent tout à coup. Ça arrive comme ça sans même le voir venir; en un éclair, nous voilà transportés dans un autre monde, une autre vie. Ça ne chante plus sur notre rue. Enfin, on a l’impression que ça ne chante plus, c’est peut-être juste qu’on ne reconnaît pas/n’entend pas la nouvelle chanson qui se fredonne. Des repères perdus, des appréhensions qui s’installent, l’inconnu… aujourd’hui ne ressemble pas du tout à hier et demain fait peur. Baf, ce n’est pas comme ça pour tout l’monde, mais il suffit de jaser avec un et l’autre pour se rendre compte que ce fut (c’est) le cas pour plusieurs. Plein de monde ont des histoires dignes d’un best-seller… si elles étaient racontées. Des vies riches, au fond, vraiment pas plates, en réalité, des histoires uniques tout en étant semblables. Des chemins parcourus d’autant plus intéressants qu’ils sont différents.

« Sur ces trottoirs, oui j’ai pleuré, beaucoup pleuré, mais j’y ai quand même trouvé, ma chanson à moi, ma chanson à moi. »

La résilience, c’est peut-être ça. C’est peut-être trouver sa chanson à soi, s’y accrocher dur comme fer et continuer sa route, la route, peu importe, malgré tout, envers et contre tous, envers et contre tout. Quelle chance que de trouver sa chanson à soi quand tout chavire, assis sur le rebord du trottoir face à une fin du monde. Pour l’avoir vécu, j’ose dire qu’heureusement c’était quand j’étais pas mal jeune. Adulte, aurais-je osé m’asseoir sur le bord d’un trottoir et pleurer jusqu’à ce que ça se mette à chanter en moi? « Yé Hi Yé Hi Hé Hi Yééé… » Ma chanson à moi, qui allait me permettre de passer au travers, de survivre et même de vivre la suite.

« Et ces arbres m’ont enchantée, m’ont balancée, m’ont fait basculer dans cette chanson à moi. »

Il y avait ces gros arbres dans nos cours, à Aylmer. Certains avaient été transformés en grandes balançoires par des parents attentionnés. On se balançait très haut, on chantait à plein poumons « Les cloches du hameau, chantent dans la prairie… Tralala, tralala… », Ou encore « C’est le mois de Marie, c’est le mois le plus beau… Au ciel, au ciel, au ciel, j’irai la voir un jour… », « C’était un p’tit cordonnier, tourne ma roulette et vire vire vire… » -- plein de chansons tirées des 100 Plus belles chansons. Balancer, balancer… chanter, chanter… respirer, respirer… autrement dit, tout naturellement et simplement s’accrocher à l’essentiel, basculer et s’enraciner du coup à la Vie. C’était les filles qui se balançaient et chantaient ainsi (oh, il y en a une qui se souvient sûrement d’avoir balancé, chanté si haut, si fort, que toute la patante de balançoire s’est tout à coup écroulée sur nous!). Les gars? Je ne sais pas ce qu’ils faisaient pour…

« Et cette rivière elle m’a bercée, m’a murmuré, m’a montré où trouver mon dieu à moi. »

La rivière des Outaouais, sur laquelle j’ai passé des centaines d’heures, en silence (pour ne pas faire peur aux poissons!). Merci à ce berceau, merci à ce silence qui oui, m’ont permis de trouver mon dieu à moi – précieux et aussi source de résilience. Il faut reconnaître son berceau, ch’cré ben, et, surtout, se laisser bercer (ça, ce n’est pas toujours évident!). J’ai l’occasion dernièrement d’observer des bébés. Oh qu’ils se laissent bercer et sombrer dans un bien-être total qui leur fait même faire des sourires qu’on qualifie souvent de spasmes… hum! Je ne peux pas croire qu’il ne s’agit que de spasmes, c’est trop évident, ces sourires disent « Ah que je suis bien… ». Je n’ai jamais vraiment observé un adulte sombrer dans le sommeil, sourit-il?

« Dans des maisons des histoires noires, dans des placards; mais j’y ai quand même gagné, mon Soleil à moi. »

C’était beaucoup comme ça, déjà. Les familles, les communautés, avaient des histoires noires qu’il fallait absolument garder dans des placards, sources de hontes ou de je ne sais quoi. Aujourd’hui, on dirait qu’il le faut un peu moins, on ouvre la porte, on sort sur le trottoir, on dénonce, on ose afficher ce qui devient de plus en plus collectivement inacceptable et il y a plein de mécanismes en place pour le faciliter. Heureusement, il y a plein de belles histoires rafraîchissantes de Soleils qui ont émergé de toutes ces mélasses.

Ma chanson à moi, ta chanson à toi… 

Ma chanson à moi

 

 

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